Un projet stratégique en crise
Le futur avion de combat européen SCAF, censé incarner la souveraineté industrielle et militaire du continent, se heurte à des tensions profondes entre les industriels français et allemands. Dans une interview accordée à une radio nationale, le PDG d'Airbus, Guillaume Faury, a qualifié la coopération entre Dassault et son groupe de "chemin de croix", révélant un écartèlement entre deux visions de ce que doit être une collaboration européenne.
Des divergences structurelles
Le SCAF, qui intègre un avion, des drones et un "cloud de combat" connecté, représente un enjeu majeur pour la défense européenne. Pourtant, les désaccords persistent sur la répartition des rôles et la gouvernance du projet.
"On a un différend assez significatif aujourd'hui sur la façon de conduire le développement de l'avion",a déploré M. Faury, pointant du doigt une approche française et allemande trop divergentes.
Un défi politique et industriel
Au-delà des questions techniques, le projet reflète les tensions politiques entre Paris et Berlin. La France, attachée à sa souveraineté industrielle, et l'Allemagne, plus encline à la mutualisation, peinent à trouver un compromis. "Il faut qu'on soit capable de faire un avion qui corresponde aux besoins des Français, mais aussi des Allemands et des Espagnols", a souligné le dirigeant d'Airbus, soulignant la complexité d'une telle entreprise.
Un appel à la coopération renforcée
Face à ces difficultés, Guillaume Faury a plaidé pour un changement de logiciel en matière de défense européenne.
"Si on veut être au bon niveau de technologie, il faut y mettre beaucoup d'investissement. Et pour y mettre beaucoup d'investissement, il faut s'y mettre à plusieurs",a-t-il insisté, rappelant que la coopération avait déjà porté ses fruits avec l'Eurofighter, mais à quel prix.
Un enjeu pour la souveraineté européenne
Alors que la guerre en Ukraine et les tensions géopolitiques renforcent l'urgence de renforcer l'autonomie européenne en matière de défense, le SCAF apparaît comme un test crucial. La France, qui mise sur ce projet pour moderniser ses forces armées, ne peut se permettre un échec. "On monte assez fortement dans le domaine de la défense et je pense que ça va continuer à s'accélérer dans les années qui viennent", a ajouté le PDG d'Airbus, faisant référence à la loi de programmation militaire qui prévoit une hausse des crédits.
Un symbole des défis européens
Le SCAF illustre les difficultés structurelles de l'Europe à se doter d'une défense commune. Entre les rivalités nationales, les logiques industrielles et les enjeux politiques, la voie vers une véritable souveraineté européenne reste semée d'embûches. "La coopération a déjà fonctionné par le passé, mais c'est un chemin de croix", a conclu M. Faury, résumant ainsi les défis persistants.
