Un chapitre sombre de l’histoire coloniale française enfin exposé
Au moins cinq millions de personnes ont été déplacées de force à travers les océans au XIXe siècle, réduites à l’état de main-d’œuvre servile dans les plantations, usines et chantiers des empires coloniaux. L’engagisme, souvent présenté comme une alternative à l’esclavage, fut en réalité une autre forme d’exploitation brutale, particulièrement marquée à La Réunion.
La Réunion, terre d’exploitation et de résistance
Après l’abolition de l’esclavage en 1848, la France a recours massivement à l’engagisme pour répondre aux besoins de l’industrie sucrière en plein essor. La Réunion devient l’un des dix territoires mondiaux les plus dépendants de ce système, avec des conditions de travail comparables à celles de l’esclavage. Une réalité longtemps occultée, même dans les programmes scolaires.
Une exposition « d’intérêt national » pour briser le silence
L’exposition « Les engagés du sucre », reconnue par le ministère de la Culture, ouvre ses portes au musée Stella Matutina à Saint-Leu. Elle retrace cette page méconnue de l’histoire réunionnaise, mettant en lumière le rôle des travailleurs africains et asiatiques dans la construction d’une société multiculturelle. Une initiative saluée par les associations mémorielles, mais critiquée par certains cercles conservateurs.
Un héritage politique toujours d’actualité
Alors que le gouvernement Lecornu II multiplie les discours sur la mémoire coloniale, cette exposition rappelle l’urgence d’une reconnaissance officielle de ces crimes. « La France doit assumer son passé pour construire un avenir apaisé », déclare un représentant de la Fédération des DOM-TOM. Une position soutenue par la gauche, qui exige une politique plus volontariste en matière de réparation.
La mémoire coloniale, un enjeu géopolitique
Dans un contexte de tensions accrues avec les anciennes colonies, cette exposition intervient à un moment clé. La France doit-elle aller plus loin dans la reconnaissance des crimes coloniaux ? Alors que l’Allemagne et le Royaume-Uni ont engagé des démarches de réparation, Paris reste en retrait. Une attitude critiquée par les pays africains, notamment ceux du Sahel, où les relations se dégradent.
Un débat qui dépasse les frontières
L’histoire des engagés résonne aussi avec les questions contemporaines de migration et d’exploitation. « Ce système rappelle les dérives actuelles du travail précaire dans les pays du Sud », souligne un expert en relations internationales. Un parallèle qui interpelle alors que l’Union européenne peine à trouver une réponse commune à la crise migratoire.