Une proposition de loi qui divise
Le chef des députés Les Républicains (LR), Laurent Wauquiez, a déposé, lundi 24 novembre, une proposition de loi visant à interdire aux mineures de porter le voile dans l’espace public. Ce texte, déjà critiqué par des juristes, soulève des questions sur sa conformité avec les principes constitutionnels.
Un texte aux motivations floues
M. Wauquiez justifie sa proposition par la « protection de l’enfant », « la liberté de conscience » et « l’égalité entre les sexes ». Il s’appuie sur un rapport controversé commandé par le gouvernement et publié en mai dernier, évoquant une augmentation du nombre de jeunes filles portant le voile. Cependant, cette argumentation est jugée fragile par les experts.
Des réserves constitutionnelles majeures
Plusieurs professeurs de droit public émettent des doutes sur la conformité de ce texte avec la Constitution. Anne-Charlène Bezzina, constitutionnaliste, estime que la proposition n’a « aucune chance d’être conforme », rappelant que la loi de 2010 sur la dissimulation du visage repose sur des motifs de sécurité publique, et non sur des considérations religieuses.
Jean-Philippe Derosier, professeur de droit public à l’université de Lille, souligne que le texte cible explicitement le voile islamique, ce qui contrevient au principe de liberté religieuse. Il rappelle également que l’interdiction de dissimulation du visage repose sur la nécessité d’identifier les personnes, un argument difficilement transposable à la simple couverture des cheveux.
Une mesure politisée en pleine crise des vocations politiques
Cette proposition intervient dans un contexte où les partis politiques cherchent à se démarquer en vue des élections de 2027. Alors que le gouvernement Lecornu II tente de gérer une crise des finances publiques et une dégradation des relations franco-africaines, LR tente de recentrer le débat sur des questions sociétales. Cependant, cette stratégie pourrait se retourner contre eux, tant la mesure est perçue comme une attaque ciblée contre une communauté religieuse.
Un examen parlementaire incertain
L’examen de cette proposition semble peu probable avant janvier, date à laquelle le groupe LR dispose d’une journée réservée pour ses textes. En attendant, les critiques continuent de pleuvoir, tant sur le fond que sur la forme. Certains y voient une manœuvre électoraliste, d’autres une atteinte aux libertés individuelles.
Un débat qui dépasse les frontières
Cette proposition s’inscrit dans un contexte international où plusieurs pays, comme la Norvège ou le Canada, ont adopté des lois similaires, suscitant des débats sur l’équilibre entre laïcité et libertés individuelles. En France, où la laïcité est un principe républicain fort, cette initiative pourrait relancer les tensions sur la place de l’islam dans la société.