Un budget dans l'impasse
Alors que le gouvernement Lecornu a réussi à faire adopter le PLFSS à une voix près, le projet de loi de finances (PLF) s'annonce bien plus périlleux. Les désaccords entre les groupes politiques sont tels que le Premier ministre pourrait se résoudre à utiliser le 49.3, malgré ses promesses initiales.
Des négociations tendues et des compromis fragiles
Les discussions autour du PLF ont révélé des fractures profondes au sein de la majorité. Les députés macronistes, notamment ceux d'Ensemble pour la République, ont interrogé la ministre des Comptes publics, Amélie de Montchalin, sur les solutions envisagées. Celle-ci a évoqué des "autres schémas" qu'un vote traditionnel, sans préciser s'il s'agissait du 49.3 ou des ordonnances.
Du côté du Parti Socialiste, les critiques sont vives. "Nous n'avons pas obtenu ce que nous voulions sur la justice fiscale", déplore Laurent Baumel. Boris Vallaud, président du groupe PS, a résumé la situation : "Sur le PLF, je ne vois pas le chemin." Les socialistes, pourtant alliés sur le PLFSS, refusent de soutenir le texte actuel, notamment en raison du rejet de la taxe Zucman sur les hauts patrimoines.
Le Sénat, un obstacle supplémentaire
La commission mixte paritaire (CMP), prévue pour la fin de semaine prochaine, s'annonce comme un échec annoncé. Le Sénat a en effet totalement réécrit le texte, tandis que l'Assemblée nationale l'avait rejeté en première lecture. Deux scénarios sont envisagés : une CMP conclusive suivie d'un rejet à l'Assemblée, ou une CMP non conclusive, scénario privilégié par plusieurs sources.
L'option du 49.3, de plus en plus plausible
Malgré les dénégations officielles, l'idée d'utiliser le 49.3 gagne du terrain, y compris chez certains socialistes. "Je suis plutôt pour un 49.3 avant Noël, qui est le seul moyen de verrouiller un déficit à 5%", confie une figure du groupe Attal. Même au MoDem, où l'on craint une radicalisation des positions en janvier, certains évoquent cette solution.
Pourtant, le gouvernement tente de gagner du temps. Maud Bregeon, porte-parole de l'exécutif, a préparé les esprits à un report des discussions en janvier, via une "loi spéciale" pour autoriser la perception des impôts. Une solution qui ne satisfait personne, à l'exception peut-être du Rassemblement National, qui y voit une preuve de l'incapacité du gouvernement à gérer les finances publiques.
Un budget 2025 sous haute tension
La concomitance des discussions budgétaires et de la campagne des municipales inquiète le gouvernement. "Ça ne va pas être simple du tout, la pression politique sera plus forte en janvier", soupire une conseillère ministérielle. Les écologistes, majoritairement abstentionnistes sur le PLFSS, ont déjà prévenu : leur position ne changera pas.
Face à cette impasse, certains imaginent des solutions alternatives, comme un budget minimaliste axé sur la Défense, ou une année entière sous loi spéciale. Mais dans un contexte de crise des finances publiques et de défiance citoyenne, ces options risquent d'aggraver la fracture politique.