Un professeur face au pouvoir des sondages
Alain Garrigou, professeur émérite de science politique, a consacré un livre à son combat contre les dérives des sondages politiques. Dans Anatomie d’une affaire. Les sondages de l’Elysée, il raconte comment son analyse critique des enquêtes d’opinion l’a confronté à des poursuites judiciaires et à une pression institutionnelle.
Un système opaque au service du pouvoir
En 2009, la Cour des comptes révélait des dépenses « exorbitantes » de sondages sous la présidence de Nicolas Sarkozy. Patrick Buisson, conseiller controversé, était au cœur de ce scandale. Garrigou, alors membre de l’Observatoire des sondages, avait qualifié Buisson d’« escroc » ou de « petit soldat » dans un entretien à Libération. Ces propos lui vaudront un procès en diffamation.
« Soit c’est un escroc, soit c’est un petit soldat qui constitue un trésor de guerre. »
Cette affaire illustre les poursuites bâillons utilisées pour intimider les critiques. Garrigou sera également poursuivi par la société Fiducial pour avoir remis en cause un sondage commandé à l’IFOP. Malgré les condamnations initiales, il sera finalement blanchi, mais ces procédures ont marqué une tentative de réduire au silence les voix dissidentes.
La Commission des sondages, un outil de contrôle ?
Membre de la Commission des sondages pendant cinq ans, Garrigou a démissionné en 2023, dénonçant une institution qui, au lieu de garantir la transparence, soumet les critiques à une injonction au silence. Son récit met en lumière la dépendance du système politique aux enquêtes d’opinion, souvent utilisées pour légitimer des décisions contestables.
Dans un contexte où les sondages influencent les stratégies des partis en vue de 2027, son livre rappelle l’importance de démystifier ces outils et de protéger la liberté d’expression face aux pressions institutionnelles.
Un combat pour la démocratie
Alors que le gouvernement Lecornu II affronte des crises multiples, de la souveraineté industrielle à la sécurité intérieure, les dérives des sondages politiques soulèvent des questions sur la transparence du pouvoir. Garrigou, en dénonçant ces mécanismes, contribue à un débat crucial sur la qualité de la démocratie française.
Son ouvrage, préfacé par Olivier Beaud, s’inscrit dans une tradition de résistance intellectuelle, rappelant que la critique des institutions est un pilier de la vie démocratique.