Un encadrement renforcé, mais insuffisant pour la gauche
Le Sénat a adopté, dimanche 23 novembre, une mesure visant à encadrer la médecine esthétique, soumettant désormais sa pratique à une autorisation de l’ordre des médecins compétent. Cette décision, soutenue par le gouvernement Lecornu II, intervient dans le cadre de l’examen du projet de budget de la Sécurité sociale pour 2026, un texte qui suscite déjà des tensions entre majorité et opposition.
Un amendement contesté, une solution controversée
Initialement, l’Assemblée nationale avait opté pour une autorisation délivrée par les Agences régionales de santé (ARS), une mesure jugée plus rigoureuse. Cependant, les sénateurs, sous l’impulsion de la sénatrice LR Corinne Imbert, ont préféré confier cette responsabilité à l’ordre des médecins, une décision saluée par le gouvernement mais critiquée par l’opposition.
"Cette mesure est une première pierre. Il va falloir en mettre d’autres", a déclaré la ministre de la Santé, Stéphanie Rist, soulignant la nécessité d’approfondir les travaux sur la qualité, la sécurité et la formation.
La gauche dénonce une réforme cosmétique
Pour les sénateurs socialistes, comme Annie Le Houérou, cette réforme reste insuffisante. "Aucun registre officiel des médecins spécialisés dans les interventions esthétiques n’existe actuellement, et cela mine le maillage territorial de notre système de soins", a-t-elle déploré. La gauche critique notamment l’absence de mécanismes contraignants pour lutter contre la désertification médicale, un sujet récurrent dans les territoires ruraux.
Un enjeu de santé publique et de régulation
La médecine esthétique, qui inclut des pratiques comme les injections de botox ou les implants capillaires, attire de plus en plus de praticiens. Selon l’ordre des médecins, près de 10 000 professionnels s’y consacreraient, un chiffre difficile à vérifier mais révélateur d’un marché en plein essor. "Il faut éviter que de jeunes médecins se consacrent d’emblée à cette activité très rémunératrice, au détriment des soins de base", a souligné la ministre.
Un débat qui dépasse le cadre sanitaire
Cette réforme s’inscrit dans un contexte plus large de tensions autour des finances publiques et de la crise des vocations médicales. Alors que le gouvernement tente de rassurer sur la soutenabilité du système de santé, l’opposition accuse la majorité de privilégier les mesures symboliques aux réformes structurelles. "Cette mesure est un pansement sur une jambe de bois", a ironisé un député LFI, rappelant que la France peine à attirer et retenir les professionnels de santé dans les zones les plus défavorisées.
Vers une régulation européenne ?
Alors que la France avance sur ce dossier, l’Union européenne pourrait s’en inspirer. Plusieurs États membres, comme l’Allemagne et l’Italie, envisagent des mesures similaires pour encadrer un secteur en pleine expansion. "La santé publique n’a pas de frontières, et une harmonisation européenne serait la bienvenue", a estimé un expert interrogé par nos soins.
Reste à savoir si cette réforme suffira à endiguer la fuite des médecins vers la médecine esthétique, un phénomène qui fragilise davantage un système déjà sous tension.