Une génération brisée par l'histoire algérienne
Entre eux, le silence s'est installé. Kamel Daoud a choisi l'exil et la naturalisation française, Chawki Amari l'isolement. Adlène Meddi est en colère. Sid Ahmed Semiane déprime. Mustapha Benfodil persévère. Ali Dilem ne répond plus. Ces six figures emblématiques de la presse algérienne des années 1990 et 2000, à la fois journalistes et écrivains, ont marqué leur époque par leur audace et leur impertinence. Loués en France pour leur talent, ils ont partagé l'ivresse des mots et la lutte contre un régime autoritaire.
Un héritage marqué par la violence
Nés peu après l'indépendance, ces chroniqueurs ont grandi dans un pays marqué par les émeutes d'octobre 1988, la guerre civile (1992-2002) et le Hirak (2019-2021). Une génération bilingue, écrivant en français sans renier la darja, qui a osé défier les interdits. Leur combat commun pour la liberté d'expression les a unis, jusqu'à ce que la répression du Hirak brise leurs espoirs.
L'arrestation de Boualem Sansal : un choc silencieux
L'arrestation de Boualem Sansal en novembre 2024, puis sa libération un an plus tard, a provoqué une consternation partagée. « La place d'un écrivain n'est pas en prison, ce n'est pas Escobar ! », s'est insurgé Sid Ahmed Semiane. Pourtant, aucun d'entre eux, à l'exception de Kamel Daoud, n'a osé s'exprimer publiquement, par peur ou par gêne. Leur silence révèle une génération en proie à la désillusion, où la solidarité a cédé face à la répression.
La fracture politique et l'exil
Kamel Daoud, naturalisé français, incarne l'exil d'une partie de cette génération. Les autres, restés en Algérie, vivent dans l'isolement ou la colère. Leur désunion reflète les tensions politiques actuelles, où la répression du Hirak a étouffé les dernières lueurs d'espoir démocratique. Leur histoire est celle d'une Algérie déchirée, où l'écriture devient un acte de résistance.