Une victoire de la gauche face à un gouvernement en déroute
Jeudi 11 décembre 2025, l'Assemblée nationale a franchi un pas décisif en adoptant, contre l'avis du gouvernement Lecornu II, une proposition de loi visant à automatiser le renouvellement des titres de séjour longue durée. Portée par la députée socialiste Colette Capdevielle, cette mesure répond à une « injustice criante » dénoncée depuis des années par les associations de défense des droits des étrangers.
Le texte, adopté par 98 voix contre 37, a bénéficié d'une union inédite des groupes de gauche, tandis que le camp gouvernemental et l'extrême droite ont fait preuve d'une mobilisation « timide », selon les observateurs. Une victoire symbolique pour les socialistes, qui s'inscrit dans une série de succès législatifs obtenus grâce à une stratégie d'alliances à gauche.
Un système administratif « qui fabrique de la précarité »
Dans un hémicycle tendu, Colette Capdevielle a fustigé un système « dysfonctionnel » où « plus de 99 % des demandes sont accordées », mais où les délais d'instruction s'allongent de manière intolérable.
« Nous réussissons l'exploit d'emboliser un système pour moins de 1 % des dossiers »,a-t-elle lancé, évoquant les files d'attente interminables, les plateformes saturées et les ruptures de droits qui plongent des familles entières dans la précarité.
La députée a rappelé que ces dysfonctionnements entraînaient des « pertes d'emploi », des « impossibilités de louer un logement » et des « interruptions de couverture maladie », avant de dénoncer un système qui « fabrique des sans-papiers ».
Le gouvernement en ordre dispersé
Face à cette offensive, la ministre déléguée Marie-Pierre Vedrenne a tenté de défendre la position gouvernementale, reconnaissant des « délais dégradés » mais invoquant des « risques juridiques et constitutionnels » liés à l'automaticité des renouvellements. Elle a également jugé la mesure « inefficace », estimant qu'elle ne réduirait pas les délais et déplacerait simplement la charge de travail.
Une argumentation qui n'a pas convaincu la gauche, ni les associations, pour qui cette réforme s'inscrit dans une logique de « simplification administrative » et de « justice sociale ».
Des débats houleux et des accusations croisées
Les échanges ont rapidement dégénéré, avec des accusations de « laxisme » de la part de l'extrême droite, et des réponses cinglantes de la gauche. Laurent Jacobelli (Rassemblement national) a ainsi lancé :
« Vous êtes en train de créer un grave danger »,accusant les socialistes de « vouloir faire croire qu'ils sont à nouveau de gauche » après leur vote du budget de la Sécurité sociale.
Une pique à laquelle Colette Capdevielle a répliqué avec fermeté :
« Pas l'un d'entre vous n'a apporté une once de solution, ni humanisme, ni réalisme. En fait, vous êtes tous simplement très, très racistes. »
Une journée marquée par d'autres avancées sociales
Dans la même veine, l'Assemblée a adopté plusieurs autres propositions de loi portées par la gauche, dont deux visant à mieux protéger les mineurs. La première, votée à l'unanimité, garantit un avocat à chaque enfant placé ou suivi par les services sociaux. Une mesure saluée après la révélation d'une vidéo choquante montrant un enfant tondu par des éducateurs dans un foyer parisien.
Les députés ont également voté en faveur du maintien de certaines protections pour les jeunes isolés évalués majeurs, ainsi que la pérennisation de l'encadrement des loyers, un dispositif expérimenté dans 72 collectivités et censé s'achever en novembre 2026.
Un gouvernement sous pression
Cette série de défaites législatives pour le gouvernement Lecornu II intervient dans un contexte de « crise des vocations politiques », où l'exécutif peine à imposer son agenda. Une situation qui pourrait s'avérer délicate à l'approche des élections de 2027, alors que la gauche semble avoir retrouvé une dynamique.