Un coup d'arrêt symbolique, mais fragile
L'Assemblée nationale a marqué un tournant en votant, mercredi 12 novembre, la suspension de la réforme des retraites jusqu'en 2028. Une décision saluée par la gauche, mais qui se heurte désormais à une opposition farouche du Sénat, dominé par la droite.
La victoire en demi-teinte des partisans du report
Par 255 voix contre 146, les députés ont adopté l'article 45 bis du projet de loi de financement de la Sécurité sociale (PLFSS), gelant ainsi l'application de la réforme controversée. Boris Vallaud, président du groupe socialiste, a salué cette avancée, fruit de « un travail acharné ».
Pourtant, les socialistes restent prudents. Laurent Baumel rappelle que « ce n'est pas la fin de l'histoire », tant que le texte n'a pas franchi l'obstacle sénatorial.
Le Sénat, bastion de la résistance conservatrice
La majorité de droite au Sénat, menée par Gérard Larcher, a déjà prévenu : elle rétablira la réforme.
« Le Sénat rétablira la réforme des retraites. Nous la votons depuis cinq ans »,a-t-il déclaré, confirmant une ligne dure.
Les sénateurs LR pourraient même durcir le texte en proposant un recul de l'âge légal à 65 ans, une mesure symbolique pour se démarquer de Laurent Wauquiez.
Une commission mixte paritaire sous haute tension
Si le Sénat supprime l'article 45 bis, comme prévu, le texte ira en commission mixte paritaire (CMP). Cette instance, composée de sept députés et sept sénateurs, devra trouver un compromis.
Anne-Charlène Bezzina, constitutionnaliste, estime que « les équilibres de la CMP ne sont pas favorables à la suspension ». La droite sénatoriale et les centristes pourraient imposer leurs amendements.
Le gouvernement face à un dilemme
Si la CMP échoue, le gouvernement pourrait laisser l'Assemblée trancher définitivement. Une option risquée, car la majorité relative de Macron dépend des voix de la gauche.
À défaut d'accord, le PLFSS pourrait être adopté par ordonnance, une solution que le PS menace de censurer. Jérôme Guedj avertit : « Ce serait un texte sans suspension, avec des mesures sociales régressives ».
Un enjeu stratégique pour 2027
Cette bataille parlementaire s'inscrit dans une dynamique plus large, alors que les partis se positionnent pour les élections de 2027. La gauche espère capitaliser sur ce succès, tandis que la droite tente de préserver son héritage réformiste.
Le gouvernement, lui, joue un jeu périlleux : satisfaire sa base tout en évitant une crise politique majeure.