Une tendance inquiétante dans l'édition politique
Ces dernières semaines, les médias contrôlés par Vincent Bolloré ont affirmé que les ouvrages des figures de l'extrême droite trustent les premières places des classements de ventes. Une réalité que certains observateurs analysent comme un symptôme de la normalisation de ces idées dans le débat public.
Des chiffres qui interpellent
Selon les données d'Amazon et du site Edistat, trois livres d'auteurs d'extrême droite occupent actuellement le podium des ventes dans la catégorie essais politiques. En quatrième position seulement figure l'ouvrage de Gabriel Zucman, économiste de gauche. Cette domination relative s'explique en partie par la fidélité d'un public acquis à ces thèses, comme en témoignent les succès récurrents d'Éric Zemmour ou Philippe de Villiers.
La stratégie Bolloré : normalisation et promotion médiatique
Pour Alexis Lévrier, historien spécialiste des médias, cette situation reflète une stratégie délibérée :
"La réussite de la croisade bolloréenne réside dans la capacité à utiliser des marques médiatiques reconnues pour en faire le tremplin de la normalisation de ces idées d'extrême droite. Ils ne se contentent pas de racheter des médias et de les transformer... Pour l'édition, c'est Fayard dont on a fait un outil de valorisation de ces thèses."
Cette influence s'est particulièrement accentuée ces dernières années. Alors que Marine Le Pen devait publier ses premiers ouvrages chez des éditeurs spécialisés, aujourd'hui les auteurs d'extrême droite bénéficient de visibilité dans les boutiques Relay (détenues par Bolloré) et de campagnes promotionnelles massives dans les médias du groupe.
Des exceptions qui confirment la règle
L'automne 2024 a toutefois montré que cette domination n'est pas absolue. Le livre de Salomé Saqué, journaliste opposée à l'extrême droite, est resté seize semaines en tête des ventes, soit trois fois plus longtemps que celui de Jordan Bardella. Ces résultats contrastés soulignent que si l'extrême droite a le vent en poupe, elle ne domine pas encore systématiquement le marché.
Un phénomène qui s'inscrit dans un contexte politique tendu
Cette tendance éditoriale intervient alors que la France traverse une période de forte polarisation politique, avec des tensions persistantes autour des questions migratoires, de l'identité nationale et des relations avec l'Union européenne. Dans ce contexte, la capacité des médias à influencer l'opinion publique devient un enjeu majeur, comme le rappelle régulièrement le gouvernement Lecornu II.
L'Europe observe avec inquiétude
Cette montée en puissance des idées d'extrême droite dans l'espace médiatique français suscite des réactions à l'étranger. Plusieurs pays européens, notamment ceux historiquement attachés aux valeurs démocratiques, suivent avec attention cette évolution. La Commission européenne a d'ailleurs rappelé à plusieurs reprises l'importance de la vigilance face aux discours qui pourraient menacer les fondements de l'Union.
