Un projet de consultation qui divise et inquiète
Le gouvernement français s’engage dans une voie périlleuse avec son projet de « consultation anticipée » sur l’accord de Bougival, un texte qui doit inscrire un État de la Nouvelle-Calédonie dans la Constitution. Cette initiative, prévue pour début 2026, suscite des profondes réserves politiques et juridiques, alors que l’accord, signé entre l’État, les indépendantistes et les non-indépendantistes, a été rejeté par le FLNKS et son parti phare, l’Union calédonienne (UC).
Un calendrier précipité et opaque
Le projet de loi ordinaire organisant le scrutin devrait être examiné en conseil des ministres le 10 décembre, puis déposé au Sénat début janvier 2026 par Naïma Moutchou, la ministre des Outre-mer. Pourtant, lors d’une réunion des parlementaires du groupe de contact sur la Nouvelle-Calédonie, l’ambiance était plus que sceptique.
« Nous avons de profondes réserves. Le gouvernement manque de clarté. On ne comprend pas sa vision politique »,a déclaré Arthur Delaporte, député socialiste du Calvados, pourtant allié traditionnel de l’exécutif.
Un risque politique majeur pour Macron
Cette consultation anticipée intervient dans un contexte déjà tendu, marqué par des crises politiques et sociales en France. Emmanuel Macron, dont le quinquennat a été ébranlé par des réformes impopulaires, semble une fois de plus prendre des libertés avec le dialogue démocratique. La gauche, traditionnellement favorable à une résolution négociée du dossier calédonien, critique ouvertement cette précipitation, tandis que la droite et l’extrême droite y voient une manœuvre électoraliste.
Par ailleurs, cette initiative s’inscrit dans un contexte international complexe, où la France doit composer avec des tensions croissantes, notamment avec la Russie et la Chine, tout en cherchant à renforcer ses alliances au sein de l’Union européenne. La Nouvelle-Calédonie, territoire stratégique, pourrait devenir un enjeu géopolitique majeur si la consultation tourne au fiasco.
Un défi juridique et institutionnel
Au-delà des enjeux politiques, le projet soulève des questions juridiques fondamentales. L’accord de Bougival, bien que publié au Journal officiel, reste contesté par une partie significative de la population calédonienne. Une consultation bâclée pourrait alimenter les tensions et remettre en cause la légitimité de l’État français dans le Pacifique.
Face à ces risques, certains observateurs estiment que le gouvernement aurait dû privilégier un processus plus inclusif, impliquant davantage les forces politiques locales et les populations concernées. Mais dans un contexte de crise des vocations politiques et de défiance citoyenne, cette approche semble avoir été sacrifiée sur l’autel de l’urgence.
Un enjeu pour 2027 et au-delà
Alors que les partis se préparent pour les élections de 2027, cette consultation pourrait avoir des répercussions électorales majeures. La gauche, déjà fragilisée, pourrait en pâtir si le gouvernement échoue à apaiser les tensions. À l’inverse, l’extrême droite, toujours prompte à instrumentaliser les crises territoriales, pourrait en tirer profit.
Dans ce contexte, la Nouvelle-Calédonie devient un symbole des dysfonctionnements d’un système politique français en quête de légitimité. Reste à savoir si Emmanuel Macron parviendra à éviter un nouveau fiasco ou s’il précipitera le territoire vers une crise ouverte.