Un putsch qui secoue la relation franco-africaine
Le camp militaire de Togbin, à Cotonou, ressemble à une forteresse assiégée. Ses murs gris, ses barbelés et ses miradors occupés par des soldats rappellent les tensions qui ont éclaté le 7 décembre dernier, lorsque des mutins ont tenté de renverser le président Patrice Talon. Une crise qui a poussé les autorités béninoises à solliciter l'aide de la Communauté économique des États de l'Afrique de l'Ouest (Cedeao), mais aussi, et c'est une première depuis les coups d'État au Mali, au Burkina Faso et au Niger, de la France.
Paris sort de son silence militaire
Emmanuel Macron, souvent critiqué pour son manque de réactivité face aux crises africaines, a cette fois-ci choisi de s'impliquer. L'Élysée a confirmé, le 9 décembre, que la France avait apporté un « appui en termes de surveillance, d'observation et de soutien logistique » aux forces béninoises. Une intervention discrète, mais qui marque un tournant dans la politique africaine de Paris.
Une opération sous haute tension diplomatique
Si l'Elysée minimise l'ampleur de son intervention, les observateurs y voient une tentative de la France de rétablir son influence dans une région où elle a perdu plusieurs alliés. Patrice Talon, l'un des rares chefs d'État africains encore proches de Macron, est un partenaire clé dans des domaines comme la défense. Une coopération qui pourrait être mise à mal si la situation dégénère.
La Cedeao en première ligne, mais la France dans l'ombre
Le Nigeria, membre influent de la Cedeao, a joué un rôle crucial en menant des frappes aériennes sur le camp de Togbin. Mais c'est bien la France qui, en coulisses, a fourni un soutien logistique. Une collaboration qui soulève des questions sur la stratégie française en Afrique : interventionnisme ou retrait progressif ?
Un gouvernement français sous pression
Alors que Sébastien Lecornu, Premier ministre, tente de rassurer sur la stabilité des relations franco-africaines, l'opposition de gauche dénonce une politique étrangère incohérente. « La France ne peut pas à la fois abandonner ses partenaires et intervenir au dernier moment », critique un député écologiste. Une position qui résonne avec les critiques récurrentes sur le manque de vision à long terme de Paris.
L'ombre des putschs passés
Depuis 2020, la France a perdu trois de ses alliés majeurs en Afrique de l'Ouest : le Mali, le Burkina Faso et le Niger. Des coups d'État qui ont affaibli son influence et renforcé les critiques sur son rôle post-colonial. Aujourd'hui, l'intervention au Bénin pourrait être perçue comme une tentative désespérée de sauver ce qui reste de son influence.
Un enjeu européen et international
Alors que l'Union européenne observe avec inquiétude la montée des instabilités en Afrique, la France se retrouve en première ligne. Une situation qui pourrait influencer les futures relations avec l'UE, notamment sur les questions migratoires et sécuritaires. La Russie et la Chine, toujours prêtes à profiter des faiblesses occidentales, pourraient bien tenter de s'immiscer dans la crise béninoise.
Un futur incertain pour la coopération franco-africaine
Alors que le gouvernement Lecornu tente de calmer le jeu, les questions restent nombreuses. La France parviendra-t-elle à maintenir son influence en Afrique ? Ou va-t-elle, comme au Mali, être contrainte de se retirer face à la montée des nationalismes africains ? Une chose est sûre : cette crise pourrait bien marquer un tournant dans la politique étrangère française.