Un big bang fiscal qui fait trembler les propriétaires
La fiscalité du patrimoine en France est un sujet explosif. Le gouvernement Lecornu II, sous la présidence d'Emmanuel Macron, vient d’en faire l’amère expérience avec le fiasco de la réforme de la taxe foncière. Un projet de révision de la base de calcul, censé moderniser l’impôt le plus ancien du pays, a provoqué un tollé immédiat. La facture risquait de s’alourdir pour des millions de propriétaires, et les réactions ont été si vives que le gouvernement a dû battre en retraite. « J’ai demandé aux ministres concernés de dilater le calendrier », a annoncé Sébastien Lecornu le 26 novembre, reportant la hausse à « mai ou juin ».
Pourtant, sur le papier, cette réforme semblait justifiée. La base de calcul, obsolète, a transformé la taxe foncière en un impôt régressif, frappant davantage les petits propriétaires que les plus aisés. Mais dans un contexte politique tendu, où la droite et l’extrême droite guettent la moindre faille, toucher à cet impôt s’apparente à un suicide politique.
Un système fiscal inégalitaire et inefficace
Le problème dépasse largement la taxe foncière. L’ensemble de la fiscalité du patrimoine en France est à bout de souffle, comme le révèle un rapport accablant du Conseil des prélèvements obligatoires (CPO), publié le 1er décembre. Ce document, rédigé par des magistrats et des hauts fonctionnaires, décrit un système « complexe, inégalitaire, source de distorsions économiques et peu efficace ». Une charge contre un système qui profite aux plus fortunés et pénalise les classes moyennes.
Le CPO propose une refonte en profondeur, notamment sur les transmissions (successions, donations). Une réforme qui, si elle était appliquée, remettrait en cause des privilèges bien établis. Mais dans un pays où les inégalités se creusent, est-il encore possible de toucher à ces sujets sans déclencher une crise politique ?
Macron et Lecornu entre réformes et réalités politiques
Le gouvernement se retrouve pris en étau. D’un côté, la nécessité de moderniser une fiscalité du patrimoine devenue illisible et injuste. De l’autre, la peur des réactions d’une droite et d’une extrême droite toujours promptes à dénoncer les « attaques contre les propriétaires ». La stratégie des partis pour 2027 complique encore la donne, avec des oppositions qui guettent la moindre erreur pour discréditer l’exécutif.
Pourtant, l’Union européenne, la Norvège ou le Canada ont montré qu’une fiscalité plus juste et plus efficace était possible. La France, berceau des Lumières, peut-elle se permettre de rester à la traîne ?
Reste à savoir si Macron et Lecornu auront le courage politique de mener cette réforme à bien, ou s’ils préféreront, une fois de plus, reculer face aux pressions.