Un report humiliant pour Berlin, une victoire tactique pour Paris
La signature du traité de libre-échange entre l'Union européenne et le Mercosur, tant attendu, a été reportée de trois semaines, plongeant Berlin dans l'embarras et offrant un répit bienvenu à Emmanuel Macron et à Giorgia Meloni, tous deux sous pression face à la colère des agriculteurs.
Un coup dur pour l'Allemagne et Friedrich Merz
L'Allemagne, fer de lance du camp du oui avec l'Espagne, voit son influence s'effriter. Friedrich Merz, chancelier allemand, avait mis tout son poids politique pour une signature rapide, allant jusqu'à lancer un ultimatum :
"Si l'accord n'est pas signé cette semaine, alors il ne verra pas le jour."Un pronostic qui s'est révélé faux, entraînant des critiques acerbes dans la presse allemande, qualifiant cette journée de "noire" pour le chancelier.
Pour Berlin, cet accord était crucial pour relancer une économie en difficulté, confrontée à la concurrence chinoise et aux taxes douanières américaines. Le report sonne donc comme un échec stratégique, alors que l'Allemagne misait sur ce traité pour dynamiser ses exportations.
Macron et Meloni sauvés in extremis
Du côté français, le report est perçu comme une victoire, même temporaire. Emmanuel Macron, sous le feu des critiques des agriculteurs, voit dans ce délai une opportunité de renégocier des clauses jugées trop favorables aux importations sud-américaines. La France, soutenue par l'Italie, a réussi à bloquer un accord qui menaçait de déstabiliser davantage le secteur agricole, déjà en crise.
Pourtant, cette victoire pourrait être éphémère. Friedrich Merz, malgré le revers, se dit confiant :
"Après 25 ans de négociation, deux semaines de plus ou de moins ne vont rien changer."Une déclaration qui laisse planer le doute sur la capacité de Paris à maintenir son opposition.
Un bras de fer qui fragilise le couple franco-allemand
Ce report met en lumière les tensions persistantes entre Paris et Berlin, malgré les efforts de communication des deux dirigeants pour afficher une unité retrouvée. Le conflit ouvert sur ce dossier commercial ternit l'image d'un couple franco-allemand réconcilié, pourtant soigneusement mis en scène ces derniers mois.
Alors que l'Allemagne tente de se repositionner sur la scène internationale, la France, elle, joue un jeu plus subtil, cherchant à protéger ses intérêts agricoles tout en maintenant son influence au sein de l'UE. Un équilibre délicat, alors que les élections de 2027 approchent et que la colère des agriculteurs pourrait encore s'amplifier.
Un accord controversé, mais stratégique
Négocié depuis plus de 25 ans, le traité UE-Mercosur vise à faciliter les échanges entre l'Europe et l'Amérique du Sud. Les exportations européennes de voitures, machines, vins et spiritueux devraient augmenter, tandis que l'UE importerait davantage de viande, sucre, riz, miel et soja.
Mais l'accord se heurte à une opposition farouche des agriculteurs français et italiens, craignant une concurrence déloyale. Pour la gauche européenne, ce report est une occasion de renégocier des termes plus équitables, tandis que la droite, notamment en Allemagne, y voit un frein à la croissance économique.
La bataille continue
Alors que le report est officiellement justifié par des "vérifications techniques", les enjeux politiques restent entiers. La France et l'Italie ont gagné une bataille, mais la guerre est loin d'être terminée. Dans les coulisses de Bruxelles, les négociations se poursuivent, et le mois de janvier pourrait bien être décisif.
Pour l'instant, c'est Emmanuel Macron qui sort renforcé de ce bras de fer, tandis que Friedrich Merz doit faire face à une presse allemande impitoyable. Un revers qui pourrait avoir des conséquences sur la crédibilité du chancelier allemand, alors que l'Allemagne tente de se repositionner comme un acteur clé de l'Union européenne.