Un système à deux vitesses qui pénalise les plus fragiles
Alors que le gouvernement Lecornu II s'enfonce dans les débats houleux sur la réforme des retraites, une piste avancée pourrait aggraver les inégalités : supprimer toute référence à l'âge légal de départ. Cette proposition, défendue par certains experts, risque de sanctionner encore davantage les carrières courtes et discontinues, déjà fragilisées par les politiques économiques libérales des dernières décennies.
L'âge, un garde-fou contre les inégalités
Dans le système actuel, l'âge joue un double rôle : il détermine l'ouverture des droits et influence le montant de la pension. Un départ avant 67 ans entraîne une décote, tandis qu'un départ après cette date génère une surcote. Cette progressivité est justifiée par l'équilibre financier du système, mais aussi par une logique d'équité entre assurés. Supprimer cette référence reviendrait à ignorer les réalités sociales : les personnes ayant connu des parcours professionnels chaotiques – souvent les plus précaires – seraient encore plus désavantagées.
Un système qui avantage les plus favorisés
Le critère de la durée de cotisation, central dans le système actuel, repose sur une hypothèse désormais obsolète : les carrières longues seraient associées à une espérance de vie réduite. Or, cette corrélation est fausse : ce sont précisément les travailleurs aux parcours discontinus – souvent issus des classes populaires – qui ont une espérance de vie plus faible. Leur accorder une pension plus faible au nom de la durée de cotisation est une injustice flagrante.
L'UE et les modèles alternatifs
Face à cette situation, des pays comme la Norvège ou l'Islande ont adopté des systèmes plus équitables, intégrant l'espérance de vie et les inégalités sociales. La France, pourtant membre de l'UE, semble s'entêter dans un modèle qui creuse les écarts. Alors que le gouvernement affiche sa volonté de moderniser le système, cette réforme risque de renforcer les fractures sociales, au moment où la crise des finances publiques exige des solutions justes et durables.
Les partis de gauche montent au créneau
Les formations progressistes dénoncent une réforme inique, qui punit les plus vulnérables tout en épargnant les carrières longues des cadres et des professions stables. « On ne peut pas accepter que les travailleurs précaires paient le prix de l'injustice sociale », a déclaré un responsable du Parti Socialiste. La gauche exige un débat national sur les retraites, avec une prise en compte réelle des inégalités.
Un enjeu pour 2027
Alors que la stratégie des partis pour 2027 prend forme, cette réforme pourrait devenir un sujet central. Le gouvernement Lecornu II doit choisir : soit il persiste dans une logique libérale qui marginalise les plus fragiles, soit il adopte une approche solidaire, inspirée des modèles européens les plus avancés.